dans un village près des fontières ∞ « Vos parents sont morts Brighid. » Ces mots résonnaient violemment dans son esprit tels de coups de poignards... Elle regardait ses parents inertes sur le sol, leurs visages livides et impassibles, leurs regards dénués d'émotion. L'odeur de la mort chatouillait ses narines. Cette petite maison de paysan empestait la mort. Un silence pensant y régnait, on entendait seulement les reniflements discrets de Brighid. Ses parents étaient morts de la peste et Brighid pleurait, le visage remplis de larmes. Elle pleurait leur mort et sa solitude. Brighid alors à peine âgée de quatorze ans, allait devoir faire face à son destin. La voisine toujours à ses côtés fit le signe de croix, posa quelques secondes sa main sur l'épaule de la jeune fille et s'en alla. Désormais seule, n'ayant aucun parent proche encore en vie, elle irait à la capitale, son rêve depuis qu'elle avait cinq ans. Que ferait-elle ? Elle l'ignorait, mais elle ne pouvait pas rester ici, elle n'avait aucun avenir, à part peut-être épouser le fils d'un autre voisin, mais c'était loin d'être sa première envie. Une autre vie l'attendait près du Château du roi., elle le savait, elle pouvait le sentir... Elle recouvrit le corps de ses parents d'un drap sale et humide grossièrement fait par sa maman quelques années auparavant. Une dernière larme coula le long de sa joue qu'elle essuya d'un geste rapide. Elle rangea quelques vêtements et de la nourriture dans un sac. Aujourd'hui un des fermiers partait pour le village de Warminster, étant un bon ami de ses parents peut-être qu'il accepterai de l'emmener avec lui. Au plus profond de son être, elle espérait. Sa vie ici était terminée. Sortant de la maisonnette, Brighid courait pour essayer de rattraper le fermier qui s'en allait en charrette remplie de légumes prêts à être vendu sur le marché.
« Attendez moi ! Monsieur ! » Il arrêta son cheval à coups de rênes. Il parut surpris.
« Brighid ? » La jeune fille, essoufflée s'arrêta à son tour, la gorge noué, elle murmura quelques mots :
« Emmenez-moi avec vous, s'il vous plaît... » Sans hésiter, il accepta et fit une petite place à ses côtés. Il aimait bien cette fillette, drôle et intelligente. Et puis il ne pouvait pas la laisser maintenant qu'elle était devenue orpheline. Il donna un coup de rêne et le cheval reprit sa course. heureuse, la jeune fille regardait le monde différemment. Un regard nouveau !
le village de warminster ∞ Endormie sur l'épaule du fermier, Brighid se réveilla en douceur lorsque les premiers bruits de la ville se firent entendre. Elle se releva en baillant fatiguée par le long voyage qu'ils venaient de faire. A l'entrée du village, elle ne put s'empêcher de s'émerveiller du monde qui l'entourait. C'était la première fois qu'elle venait. C'était comme elle l'imaginait, bruyant, rempli de monde. C'était tout simplement vivant ! Elle descendit remerciant le fermier d'un énorme sourire puis s'en alla dans les profondeurs du village à la découverte du monde.
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La nuit tombait et après une balade haute en couleur, la jeune fille n'avait aucun endroit où dormir. Elle avait perdu son ami le fermier... L’inconscience l'avait puni. Tenant fermement le sac contre sa poitrine, Brighid errait dans les rues sombres et étroites de Warminster. Les portes fermaient des maisons, les lumières éteintes, elle finira probablement par s'endormir dehors. Soudain, elle fût attirée par le bruit et la lumière étincelante d'une maison. Des cris, des rires, un bar était ouvert, peut être même une auberge, avec les économies de ses défunts parents, elle pouvait surement se payer une chambre. Lorsqu'elle y posa un pied, l'odeur de l'alcool la rebuta mais avec force, elle finit par entrer... Avant de se rendre compte où elle se trouvait. Des femmes à moitié dénudées montrant leurs formes, des hommes rougis par la chaleur, l'alcool et le désir... Des cris, des gémissements se faisaient entendre au fond de la salle... Elle était dans un bordel... Un endroit pas catholique du tout et remplis de pêché comme disait souvent ma maman. Elle recula décidant qu'il valait mieux sortir de cet endroit infâme mais une dame rondelette attrapa son bras et l'attira contre elle. Brighid se tut tandis que la vieille dame la détaillait de la tête aux pieds.
« Un corps juvénile... Es-tu vierge ma jolie ? » Le rouge lui monta aux joues. Bien sur qu'elle était, elle se réservait pour son futur mari, évidemment. Elle n'était pas une catin !
« Voudrais-tu travailler ici ? Tu aurais beaucoup de clients. » Brighid choquait retira violemment son bras de l'emprise de la dame lâchant :
« Jamais ! » et elle partit en courant, outrée. Elle, devenir une fille de joie ? Que dirais ses parents ?
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Pourtant, les jours passaient et personne ne voulait d'elle. Trop jeune pour être serveuse, pas assez minutieuse pour être couturière, trop faible pour travailler dans les champs autour du village. L'argent diminuait un peu tout les jours et la faim commençait à se faire entendre par les nombreux gargouillements de son ventre. Brighid passa à plusieurs reprises devant le bordel qui semblait être la solution à ses problèmes. Un jour, elle se décida à contre coeur, c'était vide et la femme rondelette entourait d'autres femmes nettoyaient la pièce, rangeait les tables et les chaises. Brighid tremblante de peur attira l'attention de la patronne en se raclant la gorge.
« Te voilà jeune fille ! Alors on a changé d'avis ? » Elle acquisiat timidement. Elle regrettait déjà son choix, mais est ce qu'elle l'avait ?
« C'est quoi ton prénom ? » La patronne s'avança le regard presque compatissant vers la jeune fille. Elle lui tourna autour attendant impatiemment sa réponse.
« Brighid. » Elle appela une de ses filles et lui murmura quelques mots à l'oreille.
« Brighid, Eryn va s'occuper de toi et t'apprendre tout ce qu'il faut savoir, ici, c'est la meilleure. Suis là et fais ce qu'elle te demande. » La jeune fille ne savait pas ce qu'il l'attendait, un apprentissage intense.
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Et les années passèrent, cinq ans exactement. Elle n'était plus la jeune fille timide et joviale, le sourire toujours au bout des lèvres. Elle avait changé. Catin depuis ses quatorze ans, beaucoup de client la demandaient, l'appréciaient, la baisaient pour quelques sous. Quelques nobles venaient la voir mais pas assez à son goût. Aujourd'hui, elle voulait plus. L'ambition, le pouvoir, l'argent, elle en voulait davantage. Entourée d'un draps, postée devant la fenêtre de la minuscule chambre, elle admirait le levé du soleil. Elle admirait le château, les yeux brillants. C'était ce qu'elle voulait, rentrer à la cour et une seule personne pouvait le faire et il était justement dans son lit, nu et allongé. Un noble de la quarantaine, venu ici parce que sa femme ne la satisfaisait plus au lit et il était riche. Elle se retourna vers lui tandis qu'il la contemplait maintenant depuis plusieurs minutes. Elle s'approcha de lui, retirant le drap pour dévoiler son corps nu. S'allongeant à ses côtés, sa main délicate se posa sur le corps de son client et se promena doucement. Au bout de quelques minutes, elle lâcha, comme si de rien n'était, pourtant fine calculatrice, rien n'était dû au hasard :
« J'aimerais tellement aller à la cour du roi. » Il ne dit rien, indifférent, ignorant sa phrase... Brighid ne réagit pas et se contenta de faire ce qu'elle savait si bien faire, donner du plaisir, pourtant cette matinée-là, elle était meilleure que d'habitude peut être pour lui faire comprendre ce qu'elle voulait. Et quelques semaines plus tard, elle reçut une invitation. Son voeu a été exaucé.